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Kismet Bay
Dawn Brower


Anthologie de nouvelles dans la ville de Kismet Bay. Bienvenue Г  Kismet Bay, une petite ville oГ№ magie et destinГ©e font partie du quotidien. Suivez les aventures de la famille Strange dans leur quГЄte du grand amour et de leur happy end. Un NoГ«l pas comme les autres Nouvel An, nouvelles rГ©vГ©lations Saint-Valentin Coup de chance Un Г©tГ© Г©ternel Un charme ensorcelant Retrouvailles Г  Thanksgiving NoГ«l pour toujours





Dawn Brower

Kismet Bay




KISMET BAY




DAWN BROWER




Traduction par CANGI MARGAUX



Ceci est une Е“uvre de fiction. LesВ personnages et les situations dГ©crits dans ce livre sont purement imaginairesВ :В toute ressemblance avec des personnages ou des Г©vГ©nements existants ou ayant existГ© ne serait que pure coГЇncidence.




Kismet Bay Copyright В© 2020 Dawn Brower




Tous droits rГ©servГ©s. Toute reprГ©sentation ou reproduction intГ©grale ou partielle, sous forme Г©lectronique ou imprimГ©e, faite sans autorisation prГ©alable Г©crite est illicite sauf dans le cas de brГЁves citations dans des articles et revues critiques.




PARTIE I

UN NOГ‹L PAS COMME LES AUTRES





CHAPITRE 1


DГ©cembre Г  Kismet Bay



Les quelques flocons tombés n’avaient pas tenu, formant des flaques d’eau boueuses sur la chaussée. Holly Strange regardait par la fenêtre d’un air écœuré. Les fêtes de fin d’année étaient sa période préférée et le concours de chocolats chauds était le seul événement qu’elle attendait avec impatience. Tous les magasins de Main Street y participaient. Holly tenait la boutique Serendipity Lane avec sa grande sœur Ivy. La troisième sœur et fausse jumelle d’Holly, Sage, revenait rarement à Kismet Bay. Tout dans leur magasin était fait main et sélectionné avec le plus grand soin. Elles y organisaient même des ateliers pour apprendre les loisirs créatifs et la peinture. Ce soir-là, elles proposaient un atelier pour confectionner son propre terrarium. Un choix original en plein hiver, mais les plantes sont indispensables toute l’année. Elles apportent un certain équilibre, tout en sublimant la pièce. Serendipity Lane était spécialisé dans le bien-être, autant physique que moral.

Le concours de chocolats chauds était l’occasion pour les habitants de découvrir les nouveautés des magasins et l’opportunité pour les commerçants d’attirer les touristes. C’était aussi le jour où les boutiques enregistraient leurs plus grosses ventes de l’année, si la météo le voulait bien. La parade de Noël commençait dans une heure et le concours de chocolats chauds démarrerait juste après. Holly préparait déjà sa recette secrète. Cette année, tous les participants voteraient pour leur chocolat chaud préféré et le gagnant deviendrait le chocolat chaud officiel du marché de Noël de l’année suivante. L’argent aiderait Serendipity Lane à développer leurs activités.

« Arrête de regarder par la fenêtre comme si tu pouvais changer la météo, » dit Ivy.

Derrière le comptoir, Ivy arrangeait la présentation de ses barres de savon faites main en forme de cupcakes. Elle les avait confectionnées plus tôt dans la semaine et les disposait maintenant sur les étagères. On aurait dit des gâteaux au chocolat couronnés d’un glaçage blanc à la crème. Ivy y avait même saupoudré quelques vermicelles. Ces jolies créations étaient si délicates qu’elles devaient garder un œil dessus quand des enfants entraient dans le magasin. Une fois, à l’ouverture du magasin, un petit garçon en avait enfourné un dans sa bouche. Il a vite découvert qu’ils n’étaient pas aussi bons qu’ils en avaient l’air.

Holly lança un regard noir à sa sœur, mais Ivy était trop occupée pour le remarquer.

« Tout doit être parfait, » soupira-t-elle en se retournant pour jeter un œil par la fenêtre. Le concours de chocolats chauds allait bientôt commencer. La parade était probablement déjà terminée. Elle porta son regard sur l’horizon. Les clients affluaient déjà dans les magasins. Un couple s’était arrêté pour regarder la vitrine de Grape Flavors Winery, la boutique de vins appartenant aux cousines d’Holly, Leilia et Caprecia Strange. Elles y proposaient une large sélection de vins locaux et de crus issus de leur propre vignoble.

Holly se tourna vers Ivy. « Tu penses que l’on aura du monde ? »

Ivy terminait la présentation des savons cupcakes. « Autant que d’habitude, sinon plus. Comme tous les ans. Ne t’inquiète pas.

– Je n’y peux rien, répondit-elle. Je m’inquiète pour tout. »

La fenêtre attira une nouvelle fois son regard. Tout devait être parfait. Holly devait faire ses preuves et montrer à Ivy qu’elle ne s’était pas trompée en lui accordant une place chez Serendipity Lane. Après le lycée, Holly avait renoncé à l’université pour rester à Kismet Bay aider sa sœur à ouvrir le magasin. C’est grâce à l’héritage de leur grand-mère maternelle qu’elles avaient pu lancer leur boutique. Sage, la jumelle d’Holly, avait déménagé et monté sa propre société d’événementiel. Elle avait quitté Kismet Bay le plus vite possible. Fortune’s Fortitude avait jusqu’alors été une réussite. Sage avait organisé plusieurs mariages en vue, ainsi que la soirée d’anniversaire d’un quinquagénaire. Si les choses continuaient ainsi, elle pourrait même développer sa société et embaucher d’autres employés.

« Je vais chercher un café à Witch’s Brew. » Holly ôta son manteau de la patère. « Tu veux quelque chose ?

– Attends. » Ivy contourna le comptoir pour en sortir un paquet qu’elle tendit à Holly. « Donne-le à Esmeralda. C’est son cadeau pour Tristan. »

Esmeralda et Tristan tenaient le café Witch’s Brew. Emesralda était une autre cousine d’Holly. Les Strange étaient partout à Kismet Bay. Leur ancêtre, Thomas Strange, avait joué un rôle clé dans la fondation de la ville et en fut le premier maire. Depuis, la famille a toujours été impliquée dans la vie locale. Le père d’Holly, Adam Strange, en était le maire actuel. Son jumeau, Bowen, était commissaire de police et son oncle Sébastian, l’aîné des frères Strange, procureur.

« Qu’est-ce que c’est ? » Holly était de nature curieuse. Ivy leva les yeux au ciel. « Tu le sauras si elle lui offre quand tu es là. Pourquoi veux-tu savoir ? Ça n’est pas pour toi. »

Elle haussa les Г©paules.

« Je veux juste savoir, c’est tout. Holly prit le paquet sous son bras. Tu veux un café ?

– Non, répondit Ivy. Tu pourras passer à Blooms of Destiny sur le retour ? Amadea et Ophelia ont dû recevoir les poinsettias que j’ai commandés. Je voudrais les mettre en vitrine. »

Holly grimaça. Elle ne comprenait pas la passion de ses cousines pour les fleurs. Celles-ci connaissaient tous les types de plantes et d’herbes. Mais les herbes pouvaient parfois êtes utiles. Toute la ville pensait que la famille Strange avait une sorte de protection magique. Holly n’y croyait pas. Surtout en ce qui concerne l’amour. Elle n’avait jamais eu beaucoup de chance de côté-là. On dit que l’amour vient quand on s’y attend le moins et que parfois, il est juste sous notre nez. Foutaises. Le grand amour ne sort pas de nulle part. Ce sentiment ne la quitterait jamais.

« D’accord, acquiesça Holly. Je reviens vite.

– J’en doute, rétorqua Ivy avec un sourire en coin. »

Holly sortit en tirant la langue. Elle prendrait peut-ГЄtre son temps, aprГЁs tout.




CHAPITRE 2


Kismet Bay était le parfait cliché de la petite bourgade tranquille. Le village était si pittoresque qu’il en avait presque la nausée. Nicholas Bell préférait les rues animées des grandes villes et la franchise des citadins. Les villageois de Kismet Bay se connaissaient sûrement tous et demandaient des nouvelles de leur famille.

« Tu peux me rappeler pourquoi on est là ? demanda Nicholas d’un air renfrogné en se tournant vers son ami Gabriel Reed. Le mièvre, ça n’est pas mon truc.

– Détends-toi, dit Gabriel. On reste seulement deux jours pour faire plaisir à mes parents et leur montrer que je vais bien. »

Il donna une tape amicale sur l’épaule de Nicholas.

« Et ensuite, direction les plages de sable blanc avant que tu ne fasses une réaction allergique. »

Nicholas se retint de grommeler. Gabriel était receveur pour l’équipe de football américain des Runaways de Houston. Mais il occupait le banc de touche depuis sa blessure au genou lors d’un match de qualification. Le médecin de l’équipe lui avait dit que le pronostic n’était pas bon et l’évaluation du kinésithérapeute n’était pas plus encourageante. C’était la fin de la carrière de Gabriel, mais il n’avait pas baissé les bras pour autant. Il a convaincu Nicholas de l’accompagner voir ses parents avant d’aller consulter un autre spécialiste aux Bahamas. Qui sait quel genre de charlatan exerçait là-bas ? Nicholas doutait que le docteur lui donnerait plus d’espoir que les médecins de l’équipe. Mais Gabriel étant son meilleur ami, il voulait le soutenir dans cette période difficile.

« C’est un café, Witch’s Brew ? demanda Nicholas en montrant une vitrine. Le breuvage de la sorcière… C’est quoi ce nom ? »

Gabriel haussa les épaules. « Je ne sais pas. Ça fait longtemps que je ne suis pas venu à Kismet Bay. On a qu’à aller voir à l’intérieur. »

Ils se dirigèrent vers l’entrée. Nicholas eut à peine le temps d’enclencher la poignée que la porte s’ouvrit à la volée. Une brune lui fonça dessus et renversa son café bouillant sur sa chemise bleue. Il laissa échapper un cri perçant alors que le café lui brûlait la peau.

« Faites attention ! » Nicholas était dans une colère noire. Il commençait à haïr ce trou perdu et ses habitants.

« Je suis vraiment désolée. »

La jeune femme s’avança et posa la main sur son torse. Son seul toucher l’enflamma. Il plongea ses yeux dans les siens, d’un bleu pareil à la couleur de l’océan au zénith. Ses cheveux n’étaient pas d’un marron ordinaire. Les délicates mèches rousses qui descendaient le long de ses boucles chocolat brillaient de mille feux au soleil. Elle était magnifique.

« Ce n’est rien, » dit-il en repoussant sa main. Son toucher avait éveillé quelque chose en lui et il n’était pas certain de vouloir comprendre. « Ce n’est pas grave.

– Holly ? dit Gabriel en les rejoignant. Comment tu vas ? »

Elle se tourna vers Gabriel. Ses lèvres dessinèrent le plus beau sourire que Nicholas ait jamais vu. Il lui fit le même effet qu’un coup en pleine poitrine, là où le café l’avait brûlé. Comment pouvait-elle lui faire un tel impact ? Il n’avait jamais ressenti ça auparavant. Il ne voulait pas de ces émotions, il voulait s’en éloigner à tout prix.

Elle contourna Nicholas pour prendre Gabriel dans ses bras. En reculant, elle manqua de bousculer Nicholas. Il la redressa avant qu’elle ne perde l’équilibre. Elle se retourna pour le regarder.

« Je suis désolée. Je ne suis pas aussi maladroite d’habitude.

– Pas grave, répondit-il d’une voix grave. »

Holly reporta son attention sur Gabriel.

« J’ai entendu dire que tu t’étais blessé, déclara-t-elle en agitant ses mains avec enthousiasme. En vérité, on a vu tout ce qui s’est passé. Les sportifs ne parlaient que de ça. On n’a manqué aucun match des Runaways. »

Elle détourna son regard de Gabriel pour le poser sur la manche de sa veste et fit mine d’enlever des peluches. Nicholas ne comprenait pas où elle voulait en venir.

« Enfin, je veux dire toute la famille… » dit Holly, comme si cette dernière phrase éclairait ses propos. Rien ne paraissait clair à Nicholas.

Mais cela ne semblait pas choquer Gabriel. Il acquiesça et la laissa s’embrouiller. « Comment va Ivy ? » demanda-t-il. La question attisa la curiosité de Nicholas. Qui était Ivy ?

« Euh… » Holly évitait le regard de Gabriel. « Elle va bien. Très bien. Ne t’inquiète pas pour elle. » Elle mit les mains dans ses poches pour en sortir son téléphone. « Désolée, je dois y aller. Tu devrais venir au concours de chocolats chauds tant que tu es ici. Ça sera sympa. »

Sur ces mots, elle s’éloigna et entra dans ce qui ressemblait à une boutique de fleurs. Le fleuriste avait un nom tout aussi bizarre : Blooms of Destiny ou les Fleurs du Destin. Pourquoi tous les magasins avaient-ils des noms étranges dans ce village d’arriérés ?

« Le concours de chocolats chauds ? dit Nicholas d’un air perplexe.

– On n’est pas obligé d’y aller si tu n’en as pas envie. Tu achètes un mug de Noël dans l’un des magasins et tu goûtes à toutes les sortes de chocolats chauds que proposent les boutiques, répondit Gabriel en haussant nonchalamment les épaules. Les bénéfices sont reversés à une association locale qui aide les familles les plus démunies de la communauté. La famille Strange est à la tête de l’association depuis la fondation de la ville. C’est une tradition.

– La famille Strange ? » S’il levait plus haut les sourcils, ils s’envoleraient de son front.

« C’est un euphémisme ou leur vrai nom ?

– Ça ne s’invente pas. Les Strange contrôlent quasiment toute la ville, jusqu’au maire. » Il lança un regard en direction de la boutique de fleurs dans laquelle avait disparu Holly. « Holly en fait partie.

– La mystérieuse Ivy aussi ? » La curiosité brûlait Nicholas. Son ami ne s’intéressait pas souvent à la gent féminine, à l’exception de quelques aventures d’un soir, et même celles-ci étaient rares.

Gabriel soupira. « Oui, je vois que ça t’intrigue. En réalité, c’est Holly qui t’intéresse. Si tu veux en savoir plus sur les Strange, viens au concours. Crois-moi, ils y participeront tous d’une manière ou d’une autre. » Il fit un signe de tête à Nicholas et ajouta « Viens, on va rentrer dans l’un des magasins pour s’acheter un mug. Ils en ont tous. »

Nicholas se résigna à suivre Gabriel. Qu’y avait-il d’autre à faire dans ce petit village ?




CHAPITRE 3


Holly apporta les poinsettias à Serendipity Lane et les posa sur le comptoir. Ivy n’était pas là. Il n’y avait aucun client, elle devait être dans l’arrière-boutique. La cloche lui signalerait le retour d’Holly et elle apparaîtrait dans quelques instants. Holly fixait la porte en se mordillant les lèvres. Sa sœur ne serait pas ravie d’apprendre que son ex-petit-ami était de retour à Kismet Bay.

Gabriel, l’amour de sa vie, l’avait abandonnée pour poursuivre ses rêves de gloire et de fortune. Mais maintenant qu’il était blessé, il ne serait sûrement jamais footballeur professionnel. Holly n’avait pas abordé le sujet pour ne pas remuer le couteau dans la plaie. Elle ne lui avait pas non plus demandé pourquoi il était revenu et combien de temps il comptait rester à Kismet Bay. Elle l’aurait fait si son ami ne l’avait pas autant troublée. Il l’avait tellement perturbée qu’elle n’avait même pas pensé à lui demander son nom. Holly avait encore du mal à croire qu’elle avait renversé son café sur lui. Qu’est-ce qu’il devait penser d’elle ?

« Ah, dit Ivy en s’approchant du comptoir. Ça n’est que toi. Le concours a déjà commencé ?

– Oui, répondit Holly. Ce sont les mugs de Noël ? » Chaque magasin disposait d’un stock limité de mugs que les participants devaient acheter pour goûter au chocolat chaud proposé à volonté dans les boutiques. « Tu les sors seulement maintenant ? Je pensais que tu aurais fini à mon retour. » Holly se dit qu’elle aurait mieux fait d’oublier le café et de rester à la boutique. « Je vais t’aider.

– Qu’est-ce qui t’arrive ? demanda Ivy en fronça les sourcils. Tu as l’air bizarre.

– Rien du tout, je vais bien. » Holly se tut puis commença à aligner les mugs sur l’étagère qui se trouvait derrière le comptoir. Les deux sœurs avaient disposé un distributeur de boisson sur une petite commode. Elles conservaient le reste du chocolat chaud dans une grande casserole dans l’arrière-boutique. Les clients qui possédaient déjà un mug de Noël pouvaient venir se servir et les autres avaient la possibilité d’en acheter un à la caisse.

« Tu es partie longtemps. Qu’est-ce qui t’a pris tout ce temps ? » Ivy prit les poinsettias pour les mettre en vitrine, de part et d’autre d’un tableau réalisé par un artiste local. Serendipity Lane aidait souvent les artistes de la région à vendre leurs créations, en se réservant une petite commission sur chaque vente.

« J’ai eu un incident devant Witch’s Brew. » Holly évitait le regard d’Ivy. Elle avait encore honte d’avoir renversé son café sur le bel inconnu. Elle n’avait jamais vu un homme aussi beau. Ses cheveux étaient d’un noir ténébreux et ses yeux bleus étaient si foncés qu’ils paraissaient presque noirs. Son air renfrogné les avait encore assombris. Ce n’était pas un joueur des Runaways. Elle se demandait comment Gabriel le connaissait.

« Tu ne veux pas m’en dire plus ? »

Le retentissement de la cloche épargna Holly ; les participants au concours entraient dans la boutique. Puisqu’ils avaient tous leur mug de Noël, Holly leur montra le distributeur pour goûter au chocolat chaud de Serendipity Lane. Elle était impatiente de connaître leur verdict.

« Qu’est-ce que tu regardes ? » lui demanda une voix masculine. Elle étouffa un cri de surprise. Holly se retourna pour trouver son regard. « Rebonjour. » Où était Gabriel ? Pourquoi n’était-il pas avec son ami ? Elle balaya la boutique du regard à la recherche d’Ivy, mais celle-ci était introuvable. Où était-elle ? Si elle découvrait que Gabriel était de retour, elle serait bouleversée. Elle l’aimait encore. Mais la frontière est mince entre amour et haine. Gabriel l’avait profondément blessée et Ivy en portait encore les cicatrices.

« On ne s’est pas vraiment présenté. Je m’appelle Nicholas Bell, dit-il en lui tendant la main.

– Oh, enchantée. » Pourquoi restait-elle muette devant cet homme ? « Vous restez longtemps au village ?

– De préférence pas longtemps, répondit-il. Gab doit passer quelques jours en famille, puis on ira finir les vacances dans un endroit plus ensoleillé.

– Ah oui ? » Il devait la trouver complètement idiote. « Je vois. Un peu de chocolat chaud ? » demanda-t-elle en désignant son mug de Noël.

Il regarda son mug avec dégoût. « J’en ai déjà bus plusieurs. Encore un et je me transforme en tablette de chocolat. »

Holly se mordit les lèvres, elle en aurait bien pris un carré. Pas littéralement bien sûr, mais d’une façon plus intime. Elle se ressaisit et chassa cette pensée. Elle ne l’intéresse pas. Nicholas déteste Kismet Bay, alors qu’elle n’avait jamais quitté le village. Toute sa vie était ici. « Dommage. Serendipity a le meilleur chocolat chaud de toute la ville.

– Tu as l’air bien sûre de toi, fit-il avec un sourire ravageur. Tu es obligée de tenir la boutique ou tu peux t’échapper un moment ? Où est le patron ? » Il jeta un coup d’œil autour de lui. « Prends une pause ou demande-lui si tu peux finir plus tôt. »

Elle aurait rêvé d’accepter, mais elle ne pouvait pas laisser Ivy seule. Le fait qu’il n’ait pas pensé une seconde qu’elle puisse être la gérante du magasin l’avait agacée. Même à 23 ans, on peut être une commerçante responsable. Il avait probablement quatre ou cinq ans de plus qu’elle, à peu près comme Gabriel.

« Non, désolée, répondit Holly. Elle a besoin de moi pour conduire.

– Dommage, ça aurait pu être sympa. » Son sourire disparu. « Si tu me dis où elle est, je pourrais peut-être lui faire du charme pour qu’elle te laisse partir.

– Je ne peux vraiment pas partir. Si ça avait été possible, j’aurais déjà accepté.

– Quoi ? » Il la fixa d’un air confus, puis secoua la tête.

« Ah, je vois. C’est ton magasin. »

Elle acquiesça d’un signe de tête. « Je gère le magasin avec ma sœur Ivy. » Elle désigna Ivy qui se trouvait à l’autre bout de la pièce. Elle avait l’air mécontente.

« Peut-être plus tard, alors. » Il avait tourné son regard vers Ivy. Le simple fait qu’il semblait accorder de l’intérêt à sa sœur la mettait hors d’elle. Était-il si frivole ? De toute façon, elle n’avait pas besoin de lui. Elle le laissa seul et reprit son travail derrière le comptoir. Holly avait mieux à faire que de rêvasser à un homme inaccessible.




CHAPITRE 4


Nicholas s’y était mal pris. Il décida d’attendre la fermeture de Serendipity Lane. Les horaires affichés à l’entrée du magasin indiquaient qu’il fermait à 17h. Il avait deux heures devant lui qu’il comptait bien mettre à profit. Il entra chez le fleuriste du coin et demanda s’ils connaissaient Holly. Evidemment, ils savaient qui était Holly. Gabriel avait raison, les Strange étaient vraiment partout. La boutique appartenant à la famille d’Holly, il ne lui fallut pas longtemps pour connaître ses fleurs préférées et en commander deux douzaines. Il acheta ensuite une bouteille de vin chez Grape Flavors. La chance lui sourit une fois encore et il repartit avec son cru favori. Il se rendit à Witch’s Brew et passa un marché avec Tristan Scott, cogérant du café avec la cousine d’Holly, Esméralda. Comme Witch’s Brew fermait une heure avant Serendipity Lane, il loua le café et prépara sa surprise. Il lui suffisait de trouver quelqu’un qui demanderait à Holly de s’y rendre. A sa surprise, c’est Tristan qui vint à son secours.

« Je passerai à Serendipity Lane pour lui dire qu’Esmeralda a besoin de son aide, dit-il en faisant un clin d’œil à Nicholas. Crois-moi, tu auras besoin d’aide avec les femmes Strange. Esme est déjà partie, elle aussi a rencard ce soir.

– Ça ne te dérange pas ? demanda Nicholas.

– Pas du tout, dit-il en secouant la tête. On est juste amis. C’est une autre Strange qui m’intéresse. Et un jour, elle reviendra. Comme toutes les autres. »

Nicholas fronça les sourcils. « Comment tu peux en être aussi sûr ?

– Le village les appelle. C’est grâce à elles que les affaires marchent. C’est compliqué à expliquer. » Il se tut un instant avant de continuer. « On dirait presque de la magie. Tout peut arriver, surtout quand on s’y attend le moins. Tu n’imagines pas le nombre de gens qui sont tombés amoureux ici. C’est comme si celle ville avait créée pour que les âmes sœurs se retrouvent. » Il secoua la tête. « C’est peut-être simplement moi qui veux y croire. J’ai besoin d’y croire, sinon je l’aurais perdue à jamais.

– Qui c’est ? » Nicholas était certain que ce n’était pas Holly, autrement Tristan n’aurait pas accepté de l’aider. Il avait déjà rencontré plusieurs Strange ces deux dernières heures. Mais aucune ne pouvait être le grand amour de Tristan, toutes tenaient une boutique dans le village. D’après ce que disait Tristan, elle avait quitté la baie pour de bon.

« La sœur jumelle d’Holly, Sage. »

Nicholas été agacé. Tenterait-il sa chance avec Holly si Sage ne revenait pas ? Après tout, elles étaient jumelles. « Où est-elle ?

– Elle s’est installée dans une grande ville où elle a lancé sa propre société d’événementiel. Les affaires sont bonnes apparemment. C’est la seule Strange qui n’a pas voulu rester à Kismet Bay. A part la couleur de cheveux, elle n’a rien en commun avec les autres. Elle ne trouvait pas sa place ici.

– Elle ne ressemble pas à Holly ? »

Tristan fit non de la tête. « Non, ce sont de fausses jumelles. »

Nicholas se sentit soulagé. Il voulait Holly pour lui tout seul et n’aimait pas l’idée qu’une autre puisse lui ressembler. Holly était… Il fronça les sourcils en s’apercevant qu’il devenait possessif. A cet instant, un seul mot lui vint en tête en pensant à Holly. Elle était sienne.

« Merci pour ton aide, c’est vraiment sympa.

– Pas de quoi. » Tristan rangea le comptoir avant de tendre un jeu de clés à Nicholas. « Fais attention à bien fermer en partant et donne les clés à Holly. Je passerai les chercher à Serendipity Lane. Je n’en ai pas besoin ce soir, c’est Esmeralda qui fait l’ouverture demain. »

Nicholas n’avait jamais rencontré de gens aussi peu méfiants. Tristan le connaissait à peine qu’il était déjà prêt à lui donner les clés de son café. Comment peut-on faire confiance à un parfait inconnu ? « Tu peux me faire confiance.

– Je sais, dit Tristan d’une voix énigmatique. Sinon je t’aurais déjà mis dehors. Je te l’ai dit, Kismet est magique. Tu verras bien. »

Sur ces mots, Tristan quitta Witch’s Brew et laissa Nicholas attendre Holly. Il espérait que la surprise lui ferait plaisir et qu’elle lui ferait oublier sa gaffe. Nicholas n’était pas quelqu’un d’impulsif, mais Holly semblait avoir pris le contrôle…




CHAPITRE 5


Tristan lui avait demandé de passer à Witch’s Brew. Pourquoi Esmeralda avait-elle besoin d’elle ? Holly était de mauvaise humeur. La seule chose qu’elle voulait était de rentrer chez elle et de se lover dans le canapé. Le concours de chocolat chaud avait été une réussite. Le gagnant serait annoncé dans la semaine. Esmeralda voulait peut-être l’inviter à dîner. Holly n’aurait pas dû repousser Nicholas. S’il elle avait été plus avenante, c’est peut-être lui qui l’aurait invitée à dîner. Même si elle n’a pas pu quitter Serendipity Lane pour aller le rejoindre, elle était libre toute la soirée. Holly poussa la porte de Witch’s Brew en soupirant. De petites guirlandes lumineuses éclairaient tout le café. Tristan et Esmeralda avaient-ils enfin sorti les décorations de Noël ? Ça faisait plus d’une semaine qu’Holly essayait de les convaincre d’égayer le café pour les fêtes. Toutes les lumières étaient éteintes, seules les petites guirlandes éclairaient l’intérieur. « Esme ? » appela Holly. Pas de réponse. Elle fit quelques pas et laissa échapper un cri lorsqu’il une large silhouette surgit devant elle.

« Je ne voulais pas te faire peur. » Nicholas se rapprocha. « Je t’ai préparé une petite surprise. »

Tristan et sa cousine avaient-ils tout organisé ? Comment avaient-ils su que Nicholas lui plaisait ? Peu importe, elle leur demanderait des comptes plus tard. Elle avait espéré passer la soirée avec Nicholas et ce rêve se réalisait. La question était maintenant de savoir si elle voulait vraiment que Nicholas le sache. « C’est rien. Je pensais trouver ma cousine et j’étais surprise de te voir ici.

– Pardon, dit-il. Mais je voulais te revoir et ça semblait être une bonne idée. »

Holly examina minutieusement la salle. Des lys roses et blancs, ses préférés, étaient disposés dans un vase au centre de l’une des tables. A côté se trouvait une bouteille de riesling accompagnée de deux verres à vin vides ainsi que deux assiettes, chacune couronnée d’un couvre-plat. Si Nicholas avait réuni toutes ses choses préférées, il y avait de fortes chances pour que son plat favori se trouve dans ces assiettes. Holly reporta son attention sur lui. Il portait un costume foncé et avait changé sa chemise tachée de café pour une chemise d’un bleu légèrement plus clair que ses yeux, tandis que sa cravate se confondait parfaitement avec ceux-ci. Holly se contrôlait pour ne pas se jeter dans ses bras.

« Alors ? dit-il, impatient. Est-ce que tout est à ta convenance ? »

Les lèvres d’Holly esquissèrent un sourire sensuel. « Jusqu’à maintenant, oui. » Elle enleva son manteau d’hiver pour l’accrocher à la patère et reposa ses yeux sur Nicholas. « Dis-moi ce qu’il y a au menu et je te dirai si tout est parfait.

– Du poulet au marsala assorti de pâtes au blé complet. » L’eau lui vint immédiatement à la bouche, c’était son plat préféré. Elle découvrait en Nicholas l’homme parfait et cela lui faisait un peu peur.

« Comment…

– J’ai fait ? dit Nicholas en finissant sa phrase. Ta famille a beaucoup aidé. Il faudrait peut-être leur dire que c’est dangereux de dévoiler autant de choses à quelqu’un qu’on ne connaît pas. »

Une seule raison pouvait expliquer leur motivation. La magie de Kismet Bay, la baie du destin. Ce nom n’est pas un hasard. Les fondateurs de la ville, les ancêtres d’Holly, croyaient au destin. En pleine tempête, leur navire les avait amenés sains et saufs sur la baie. Depuis, l’aura magique de la baie leur avait apporté bien d’autres promesses. Et l’une de ces promesses était l’amour. L’amour ne se résume pas à trouver son âme sœur, mais lorsque l’on croise son chemin, il est difficile de l’ignorer. C’est la raison pour laquelle Ivy était si mélancolique. Gabriel était son âme sœur. Sans lui, elle n’était plus elle-même. Nicholas était-il l’âme sœur d’Holly ? C’est ce que semblait penser sa famille. Et Holly commençait à y croire aussi. Elle se sentait attirée vers lui et tous les efforts de Nicholas lui laissaient penser qu’il ressentait la même chose.

« Les Strange font toujours confiance à leur instinct. Ils ne t’auraient pas aidé s’ils pensaient que ça n’en valait pas la peine. » Elle ne voulait pas lui faire peur en parlant de destin et de magie. Mais elle voulait faire une chose avant de prendre toute décision. Elle s’approcha de Nicholas et passa les bras autour de son cou. « Embrasse-moi. »

Nicholas n’attendait que ça. Il se pencha et pressa ses lèvres contre les siennes. La magie qui occupait ses pensées enveloppa les amoureux dans une étreinte passionnée. La langue de Nicholas se confondait avec celle d’Holly. Elle pouvait enfin le goûter : un parfum de cannelle et de chocolat, les deux ingrédients de son chocolat chaud. Sentant le désir l’envahir, Holly gémit de plaisir. Elle aurait voulu le déshabiller et enfin savoir s’ils étaient compatibles sur tous les aspects. Mais elle se retint. C’était encore trop tôt pour ce genre d’intimité. Elle fit un pas en arrière avant de prendre une décision qu’elle pourrait regretter plus tard.

« C’est…

– Je sais, répondit-elle. »

Il secoua la tête. « Je veux aller plus loin avec toi. »

Holly lui sourit. Nicholas était-il la clé de son bonheur ? Elle pensa à Ivy et choisit la prudence. « Il me faut un peu plus de temps. Mais comment faire si tu habites ailleurs ? »

« Je ne sais pas. Je veux nous donner une chance, si tu en as envie. »

Holly acquiesça. « Moi aussi. »

Nicholas l’attira à lui et la serra dans ses bras. « Je ne pensais pas te rencontrer en accompagnant Gabriel ici, mais je suis content de t’avoir trouvée. Je vais lui dire que je ne peux pas l’accompagner. Je resterai à Kismet Bay pour les fêtes. Pour le reste, on prendra notre temps. »

Holly se blottit contre lui et ferma les yeux. Elle avait enfin ce qu’elle désirait le plus au monde et était bien décidée à ne pas laisser passer sa chance. Toutes les histoires ont un début, ce Noël serait celui d’Holly et de Nicholas.




PARTIE II

NOUVEL AN, NOUVELLES RÉVÉLATIONS





CHAPITRE 1


Le vent froid qui soufflait sur la baie s’engouffrait dans la veste en cuir de Nash. Il frotta ses mains dans l’espoir de réchauffer ses membres engourdis. Il serait bientôt arrivé. Encore quelques pas et il arriverait à Grape Flavors Winery où il pourrait passer quelques instants précieux avec l’amour de sa vie, Leilia Strange.

Ils étaient meilleurs amis depuis l’école primaire. Et si Nash avait toujours été amoureux d’elle, Leilia ne voyait en lui rien d’autre qu’un ami. Parfois, la situation lui pesait plus qu’il ne voulait bien l’admettre. Mais la plupart du temps, il s’estimait heureux de faire partie de sa vie. Aujourd’hui, il avait décidé de prendre son courage à deux mains et de lui avouer ses sentiments.

Il poussa la porte et entra. Ce que Leilia et sa sœur Caprecia avaient fait de la boutique impressionnait Nash. Chaque bouteille était rangée par domaine sur des étagères. Elles avaient même une partie dédiée aux fromages. L’atmosphère était chaleureuse et accueillante. Elles possédaient un vignoble aux alentours de la ville avec leur troisième sœur, Ophelia. Chacune avait son propre rôle dans l’exploitation viticole, mais Ophelia ne travaillait pas à la boutique. Elle préférait aider leur cousine Amadea à la boutique de fleurs Blooms of Destiny. La famille Strange, dont les ancêtres avaient fondé la ville il y a deux cents ans, était impliquée dans nombre de commerces et d’événements locaux.

Nash s’avança vers le comptoir du fond, où il espérait trouver Leilia. Il n’avait aucune raison de venir à la boutique, mais comme il y passait souvent, ni Caprecia ni Leilia ne lui demanderait ce qu’il faisait là. En contournant le comptoir, il l’aperçut. Ses longues boucles d’ébène tombaient en cascade sur ses épaules. Il ne pouvait voir ses yeux d’où il se tenait, mais leur couleur bleu cobalt était gravée dans sa mémoire. Leilia tout entière était gravée dans sa mémoire. Jamais il ne pourrait l’effacer, et il ne voulait l’effacer pour rien au monde. Il s’approcha pour lui parler. Il allait la saluer quand Caprecia surgit de l’arrière-boutique et bouscula Leilia.

« Qu’est-ce que tu fais encore ici ? demanda Caprecia. Rentre te préparer pour ton rencard ! »

Nash se figea. Un rencard ? Leilia ne lui avait pas dit qu’elle prévu quelque chose pour le Nouvel An. Et dire qu’il pensait qu’ils se disaient tout. Il était pourtant simple d’en avoir le cœur net. Il suffisait d’aller lui parler. Le sujet viendrait naturellement. Mais ses pieds ne voulaient pas bouger et son cœur se serrait à tel point qu’il ne pouvait presque plus respirer.

« J’ai encore le temps, » répondit Leilia nonchalamment. Concentrée sur ses affaires, elle ne vit pas Nash s’approcher. « Je dois finir l’inventaire avant de partir. On n’a plus de moscato ni de champagne rosé. » Elle jeta un œil à sa montre et soupira. « C’est l’un des jours les plus importants de l’année. Qu’est-ce qui m’a pris d’accepter ce rencard avec Perceval ?

– Parce que tu cherches encore ton prince charmant ? dit Caprecia avec un clin d’œil. Tu as compris ? »

Leilia lui lança un regard noir. « Ha ha, très drôle. » Elle ne semblait pas apprécier les insinuations de Caprecia, mais Nash ne s’en souciait pas. La seule chose qu’il voulait, c’était être le seul aux yeux de Leilia. « Arrête avec ça. Après tu vas dire que je veux un chevalier servant. » Leilia leva les yeux au ciel. « Je sais déjà ce que les gens diront. Les trois chevaliers, comme on les appelle. Qu’est-ce qui a pris à leurs mères ?

– Aucune idée, répondit Caprecia en haussant les épaules. Elles espéraient peut-être que ça les rende aussi courtois que les chevaliers de la Table ronde. Il manque juste Lancelot et Galaad. Elles ont dû baptiser leurs fils d’après deux autres types. » Elle marqua une pause et porta un doigt à son menton. « Sage manque encore à Tristan. Il ne reste plus que Perceval et Gauvain, enfin si tu arrives à l’éloigner des tentations d’Hollywood. Donc en réalité, il n’y a que Perceval. Tu vas le séduire ? dit-elle en agitant les sourcils de haut en bas. Tu penses avoir tes chances ? Il est vraiment pas mal. »

Nash ne supportait plus leurs plaisanteries. Il mit les mains dans ses poches machinalement. Les trois hommes dont elles parlaient l’avaient martyrisé au lycée. Seules quatre années s’étaient écoulées depuis le bac et ces souvenirs étaient encore frais dans sa mémoire. Même si leur relation s’était améliorée, Nash n’avait jamais oublié la façon dont ils l’avaient traité.

Il tourna les talons pour partir, mais il était déjà trop tard. « Nash, » appela Leilia. Le ton joyeux de sa voix illumina le visage de Nash. « Viens, j’ai un nouveau vin à te faire goûter. »

Nash sortit les mains de ses poches et s’approcha d’elle. Il ne pouvait rien refuser à Leilia. « Ah oui ? dit-il en se penchant sur le comptoir. Je vais regretter d’en avoir bu ?

– Mais non ! » Elle lui donna une légère tape sur l’épaule. « Je t’ai déjà déçu ?

– Pas pour l’instant, mais on a encore le temps. » Son large sourire n’était pas entièrement forcé. Nash était heureux de la voir, mais la conversation qu’il avait surprise l’avait agacé. On dit qu’il n’est jamais bon d’écouter aux portes…

« Toujours le mot pour rire. » Elle sortit une bouteille foncée qui était rangée sous le comptoir. « C’est le nouveau merlot de notre vignoble. Tu me diras ce que tu en penses. On veut le lancer pour le Nouvel An. »

– Nouvel An, nouvelles révélations. » Il ne pensait avoir prononcé ces mots à voix haute.

« Comment ça ? » demanda Leilia.

Nash aurait voulu que la nouvelle année soit celle de l’amour, mais Kismet Bay ne semblait pas l’entendre ainsi. Tous les habitants pensaient que leur vie amoureuse était entre les mains du destin. « Non, rien. » Il leva la bouteille. « Merci pour le vin. Appelle-moi plus tard, on s’en boira un verre. »

Elle lui sourit. « D’accord. Qu’est-ce que tu as prévu ce soir ? »

C’était le moment idéal pour lui dire qu’il aimerait passer la soirée en sa compagnie. Pourtant, il ne saisit pas sa chance. « Pas grand-chose. Je vais rester à la maison.

– Tu vas regarder la soirée du Nouvel An à la télé ? dit-elle en penchant légèrement sa tête sur le côté.

– Peut-être. Enfin, si je ne m’endors pas avant. » Il jeta un coup d’œil à Caprecia qui faisait tout pour passer inaperçue. Elle voulait sûrement leur laisser un peu d’intimité. Nash n’était pas sûr. « Je dois y aller. » Sans d’autres mots, il sortit en vitesse de la boutique. Son cœur commençait à s’emballer.




CHAPITRE 2


Nash était presque parti en courant. Leilia aurait dû le suivre. Il agissait bizarrement. Quelque chose l’embêtait sûrement, mais il avait décidé de ne pas lui en parler. Elle n’avait aucune idée de ce que cela pouvait être. Si seulement elle avait refusé de passer le réveillon avec Perceval Wright. Elle se demandait encore pourquoi elle avait accepté. Perceval était sympa, mais elle ne se voyait pas rester longtemps avec lui.

« Je rentre, dit-elle à Caprecia. On se verra demain au vignoble. » Même si la boutique de vin était fermée le 31 décembre, elles devaient travailler la journée. Prosperity Vineyard était un peu leur résidence secondaire. Située à environ 50 km de la ville, la propriété comprenait un petit corps de ferme qu’elle partageait avec ses sœurs. Chacune avait sa propre chambre. Mais avec leur commerce en ville, elles y passaient rarement la nuit.

Leilia monta dans sa voiture, mit le contact et laissa tourner le moteur quelques minutes avant de démarrer. Une fois arrivée à son appartement, elle prit sa douche et se prépara pour ce soir. Elle espérait ne pas regretter son choix. Perceval avait prévu de l’emmener à la soirée organisée à Witch’s Brew. Sa cousine Esmeralda, cogérante du café, avait commandé quelques caisses de champagne rosé à Grape Flavors pour l’occasion. Un moyen de fêter le passage à la nouvelle année.

Elle opta pour un brushing et brossa ses cheveux jusqu’à ce que l’éclat la satisfasse. Pour la tenue, elle choisit une longue jupe bleue fendue sur le côté et un haut noir avec des manches longues en dentelle. Une paire de sandales à petit talon complétait le tout. Leilia aimait s’apprêter pour les grandes occasions, des occasions trop rares à son goût.

Quelqu’un frappa à la porte, la tirant de ses pensées. Elle se leva et ouvrit la porte pour découvrir Perceval, très élégant avec son costume foncé et sa cravate verte assortie à la couleur de ses yeux. Il lui tendit une rose. « Je ne savais pas quoi te prendre. J’espère que ça te plaît. »

Leilia prit la rose et en huma le parfum. Elle adorait toutes les fleurs, mais les roses n’étaient pas ses préférées. Enfin, il ne pouvait pas le savoir. « Merci, elle est très belle.

– Tout comme toi, » répondit-il d’une voix suave. Il n’y était pourtant pour rien, mais elle était déçue. « Prête ?

– Oui, » dit-elle en posant la rose sur la console de l’entrée. Elle aurait sûrement dû la mettre dans de l’eau, mais Leilia s’en fichait. A quoi rimait ce rendez-vous ? Elle savait que Perceval n’était pas celui qu’elle voulait, mais elle avait tout de même accepté son invitation. Elle soupira et se résigna à passer la soirée avec lui. Il était trop tard pour annuler. Elle prit son manteau, l’enfila et suivit Perceval.

Witch’s Brew n’était qu’à quelques pas. Une fois à l’intérieur, elle accrocha son manteau et regarda les décorations. Esmeralda et Tristan s’étaient surpassés. Le café était illuminé par de petites guirlandes lumineuses et rempli de ballons.

« Tu es venue, s’exclama Esmeralda en prenant Leilia dans ses bras. Je peux t’offrir quelque chose à boire ?

– Non, merci. »

Esmeralda se tourna vers Perceval. « Tristan te cherchait. Je crois qu’il est derrière le comptoir. Va lui dire bonjour !

– J’irai dans une seconde, répondit Perceval en jetant un œil dans la direction que lui avait indiquée Esmeralda.

– Comme tu veux. Je dois faire le tour des invités. N’oublie pas de me dire au revoir avant de partir, dit-elle en se tourna vers Leilia. »

Sur ces mots, Esmeralda alla saluer les nouveaux arrivants. Leilia reconnaissait bien là sa cousine, toujours au centre de l’attention.

« Tu veux quelque chose à boire ? » Leilia leva presque les yeux au ciel. N’avait-il pas entendu qu’Esmeralda venait juste de lui demander ?

« Non. » Lui en vouloir ne changerait rien. Elle ne savait pas quoi dire. « Je prendrai un verre plus tard.

– Si ça ne te dérange pas, je vais m’en prendre un. » Il la laissa seule pour se rendre au buffet où Tristan parlait avec quelqu’un. Il sourit de plus belle en voyant Perceval approcher. On aurait dit qu’ils ne s’étaient pas vus depuis des jours. Même si c’était le cas, cela agaça Leilia.

Ils étaient à Witch’s Brew depuis à peine quinze minutes et Perceval la délaissait déjà pour l’un de ses meilleurs amis. Leilia ne pouvait pas vraiment lui en vouloir, elle aurait fait la même chose si Nash était là. Mais Perceval devait se comporter en gentleman.

Pas vraiment digne d’un chevalier servant. Heureusement, elle ne s’attendait pas à ce qu’il le soit. Perceval en aurait sûrement pour un moment. Elle aurait pu trouver quelqu’un à qui parler, mais étrangement elle n’en avait pas envie. Il n’y avait qu’une seule personne à qui elle souhaitait parler et elle n’était pas là. Peut-être valait-il mieux mettre fin au rendez-vous avant qu’elle ne soit déçue ? En réalité, elle été déjà déçu avant qu’il n’ait même commencé.

Leilia attrapa son manteau et sortit du café. Elle s’amuserait bien mieux chez elle avec un bol de popcorn et un verre de vin. Elle appellerait peut-être même Nash pour partager le popcorn et le vin. Cette perspective lui plaisait de plus en plus.

Leilia jeta un œil à Perceval et se demanda s’il fallait le prévenir. Elle décida que non, sortit son téléphone et lui écrivit un message en s’excusant et en prétextant qu’elle devait partir. Elle remit le téléphone dans sa poche et, au lieu de rentrer chez elle, elle prit la direction de l’appartement de Nash. Elle avait besoin de son meilleur ami.




CHAPITRE 3


Nash entra dans son appartement et posa le vin que Leilia lui avait donné sur le comptoir. Il enleva sa veste et la jeta sur une chaise, mais il manqua sa cible et la veste tomba par terre. Il la fixa plusieurs secondes, se demandant s’il était vraiment nécessaire de la ramasser et de l’accrocher à un cintre. Il la ramassa en soupirant et la rangea à sa place dans la penderie. Après tout, ça n’était pas la faute de sa veste s’il n’avait pas eu le courage d’avouer ses sentiments à Leilia. Son regard se posa sur la bouteille qu’elle lui avait offerte. Il envisagea une seconde de la boire à lui seul, mais un simple merlot ne suffirait pas à noyer son chagrin. Il avait besoin de quelque chose de beaucoup plus fort.

Il sortit d’un placard une bouteille de whisky et s’en servit une dose généreuse. Il porta le verre à ses lèvres et le but d’un trait. Trois verres plus tard, la pièce commençait à tourner et son cerveau engourdi avait légèrement apaisé son esprit torturé. Nash posa le verre sur le comptoir et, la bouteille toujours à la main, tituba en direction du canapé. Pourquoi s’embêter avec les bonnes manières ? Autant boire à la bouteille.

Nash s’assit, ou plutôt tomba sur le canapé, en serrant la bouteille contre lui. Il attrapa la télécommande et alluma la télé. Deux personnes apparurent à l’écran, un homme et une femme. Nash grogna quand l’un d’eux prit la parole. « Bonjour, je suis Gauvain Daly et voici ma coprésentatrice, Jocelyn Stacy. »

« Espèce de rat, » murmura Nash à voix basse. Gauvain replaça sa mèche de cheveux noirs et se tourna vers Jocelyn. « Regardez tous ces gens qui ont bravé le froid pour célébrer le Nouvel An à New York ! » Il dégaina son plus beau sourire pour la caméra et se tourna vers sa coprésentatrice. « Quelles sont vos bonnes résolutions pour la nouvelle année ? »

« J’ai quelques suggestions de résolutions pour toi, Gauvain, » marmonna Nash. Il se retint de jeter son whisky à la télé et, à la place, décida d’en prendre une autre gorgée. Il pensait avoir laissé le lycée derrière lui, mais la rancœur était toujours là.

« Pour être honnête, je ne crois pas vouloir changer ma vie, répondit Jocelyn. Et vous ?

– Pourquoi changer ce qui est parfait, fit Gauvin avec un clin d’œil. Vous avez quelqu’un en tête pour le baiser de minuit ? »

A travers ces mots, on aurait presque pu le voir bouger ses sourcils de haut en bas. Nash grinça des dents. Il était évident que Gauvain voulait que Jocelyn l’embrasse. Il espérait que la belle présentatrice lui refuserait ce plaisir. Nash prit une autre gorgée de whisky. Il en avait déjà bu la moitié. A ce rythme, il aurait bu toute la bouteille et serait déjà endormi avant minuit.

« J’ai quelques idées, » dit Jocelyn d’un air audacieux. Elle mordilla ses lèvres d’un mouvement sensuel, laissant peu de place à l’interprétation de ses propos.

« Ce connard a toujours eu tout ce qu’il voulait. » Pourquoi regardait-il encore la télé ? Voir Gauvain séduire l’actrice avec laquelle il avait tourné son dernier film est la dernière chose dont Nash avait besoin. Gauvain était à la tête des trois chevaliers. Perceval et Tristan étaient toujours plus sympas quand il n’était pas là. Nash avait même été ravi de le voir partir pour la Californie en quête de gloire et de fortune. Un rêve qu’il n’a pas mis très longtemps à réaliser. La chance lui avait toujours souri.

La caméra se posa sur la boule de lumière prête à annoncer le passage à la nouvelle année. La voix de Gauvain résonnait encore dans sa télé. « Comme vous pouvez le voir, la boule est prête à tomber. Il n’y a plus qu’à attendre minuit et trinquer à la nouvelle année. En attendant, allons prendre des nouvelles de notre correspondant à Los Angeles, Corbin Vale. »

Nash détourna le regard de la télé. Il pensait avoir bu assez de whisky pour oublier le rendez-vous de Leilia avec Perceval, mais elle lui revenait inlassablement à l’esprit. Allait-elle embrasser Perceval, tout comme Gauvain embrasserait Jocelyn ? Cette pensée lui tordit l’estomac. Il regrettait d’avoir bu autant. Peu importe, après tout. Il avait déjà atteint le point de non-retour. Qu’avait-il à perdre ?

Il reprit une gorgée de whisky. L’alcool ne lui brûlait plus la gorge. On frappa à sa porte. Alors qu’il pensait l’avoir imaginé, le bruit reprit. Nash se redressa et jeta un regard embué à la porte. Il ne pourrait jamais marcher jusqu’à l’entrée sans s’écrouler. « C’est ouvert, » hurla-t-il. Avant qu’il n’ait le temps de se demander qui se trouvait derrière la porte, Leilia entra. Qu’est-ce qu’elle faisait là ? Que s’était-il passé avec Perceval ? S’il l’avait blessée… Une fois sobre, Nash lui ferait regretter. Personne ne fait de mal à l’amour de sa vie.




CHAPITRE 4


Leilia fixait Nash comme si elle ne l’avait jamais vu auparavant. Ça ne ressemblait pas à son meilleur ami. On aurait dit qu’il était… « Tu es ivre ? » Elle ferma la porte derrière elle et enleva son manteau. S’il avait bu autant, elle devait veiller sur lui.

« J’ai pris quelques gorgées de whisky, dit-il en levant sa bouteille à moitié vide.

– Ne me dis pas que c’était une bouteille neuve. » Qu’est-ce qui lui a pris de boire autant ? C’était le réveillon, mais quand même… Nash ne buvait pas autant en temps normal. « Donne-moi ça. » Elle lui prit la bouteille des mains et la mit sur le comptoir, hors de sa portée. « Qu’est-ce qui t’a pris ? Tu agis bizarrement aujourd’hui.

– Si l’on ne peut plus boire tranquillement… » Il fit un geste en direction de la télévision. « Tiens, regarde. C’est l’un de tes trois chevaliers. »

Leilia jeta un œil à la télé. C’était bien Gauvain qui parlait aux spectateurs sur le petit écran. Il avait toujours été ainsi, à se nourrir de l’attention et s’épanouir sous les projecteurs. Gauvain était très attirant. Digne d’un acteur hollywoodien. Il utilisait son visage et son corps parfait pour se faire une place au soleil. Leilia ne connaissait Gauvain que parce qu’il était ami avec Tristan. Autrefois, Tristan et sa cousine Sage étaient inséparables. Elle ne comprenait d’ailleurs toujours pas pourquoi ils s’étaient séparés. Sage avait disparu au même moment que Gauvain partait tenter sa chance à Hollywood. Parfois, elle se demandait si leurs départs étaient liés. « Ni Gauvain ni aucun des chevaliers, comme tu dis, ne m’intéresse. Je n’ai jamais voulu avoir affaire avec ce trio. » Elle ne pensait pas que ces propos auraient une résonnance si narquoise.

« Qu’est-ce que tu veux, alors ? bredouilla Nash. Je pensais te connaître, mais je me suis trompé. »

Leilia soupira. « Je vais faire du café. Tu en as besoin et moi aussi. » Elle aurait besoin de plusieurs expressos pour réussir à calmer son ami.

« Fais comme chez toi, répondit Nash. Moi, je n’en veux pas. Ramène-moi le whisky, c’est tout ce dont j’ai besoin. »

Leilia se dirigea vers le comptoir et plaça une tasse sous la machine à café. Elle mit une capsule, remplit l’eau du réservoir et mit en marche la machine. Elle remarqua la bouteille qu’elle lui avait offerte plus tôt dans la journée. Au moins, il n’avait pas gâché le bon cru. C’était un vin qu’il fallait savourer et non pas descendre en quelques gorgées. Une fois le café prêt, elle lui amena une tasse. Il était noir, comme Nash l’aimait. « Tiens, dit-elle en lui tendant la tasse. Bien noir pour une bonne dose d’énergie. Enfin, peut-être pas autant d’énergie qu’une demi-bouteille de whisky. »

Il renifla le café et lui rendit la tasse. « Ramène-moi le whisky. Aucune chance que je boive ça sans une bonne dose d’alcool dedans. »

Elle lui reprit la tasse en soupirant et la posa sur la table basse qui faisait face au canapé, puis s’assit à ses côtés. « Plus de whisky pour toi. Dis-moi plutôt ce qui ne va pas. »

La voix de Gauvain résonnait encore dans la pièce. Nash lançait des insultes à la télévision. Leilia prit la télécommande et l’éteignit. Ça ne servait à rien de le provoquer davantage. Elle savait très bien qu’il détestait Gauvain, Tristan et Perceval. C’étaient les stars du lycée, tandis que Nash faisait partie des marginaux. Mais au cours des dernières années, il était devenu incroyablement séduisant. Elle préférait ses cheveux blonds et ses yeux bleu clair qui laissaient deviner son intelligence. Nash était un génie. Il développait des logiciels grâce auxquels il était devenu riche. Il aurait pu s’acheter une belle villa, mais préférait son petit studio au-dessus de la boutique Serendipity Lane tenue par ses cousines.

« Qu’est-ce qui te rend heureuse ? lui demanda-t-il. Tu ne rêves pas d’autre chose que de ton vignoble et ton magasin de vin ? »

Elle replaça l’une de ses belles mèches de cheveux blonds derrière son oreille. Cela faisait un an qu’il se laissait pousser les cheveux. Ils étaient presque assez longs pour faire une queue de cheval. Leilia le préférait avec les cheveux longs. « Je crois qu’on ne sait jamais vraiment ce qu’on veut. Mais oui, je suis heureuse. J’adore le vignoble et la boutique. »

« Mais tu ne veux pas… Je ne sais pas. Plus ? »

« Tu veux dire un mari et une famille ? Peut-être même une maison avec un jardin et un chien ? » Elle haussa les épaules. « Un jour, peut-être. Si je trouve la bonne personne. »

Il garda le silence quelques secondes. « La bonne personne, » marmonna-t-il enfin. Nash se frotta les yeux. « Je crois que je vais aller me coucher. »

Leilia ne le contredit pas. Elle s’étonnait qu’il ait encore les yeux ouverts et qu’il n’ait pas vomi après tout le whisky qu’il avait bu. « Bonne idée. Je vais t’aider à te lever.

– Non, ça va aller. » Il se leva, chancela un instant puis se rassit en tombant. « Ok, j’ai peut-être besoin d’un peu d’aide. »

Elle se leva en riant et lui tendit la main. « Allez, mon grand. » Nash réussit à se redresser avec son aide. Il passa ses bras autour d’elle et tituba jusqu’à son lit. « On va t’enlever cette chemise.

– Tu essayes de me déshabiller pour abuser de moi ?

– Jamais de la vie ! » Elle rougit. Elle avait longtemps admiré en secret le torse musclé de Nash, mais elle ne voulait pas lui avouer.

« Vas-y, si tu veux. Ça ne me dérange pas, » dit-il. Elle déboutonna sa chemise et lui enleva. « Ça serait même plutôt marrant. » Ses paupières se fermèrent et il se laissa tomber sur le lit.

Leilia remit ses jambes sur le lit pour qu’il soit plus confortable et le couvrit avec une couverture. Elle avait fait quelques pas en direction de la porte quand il l’appela. « Ne t’en va pas, la supplia-t-il. Reste avec moi. »

Ses yeux avaient une lueur inconnue. La supplier ne lui ressemblait pas. Elle n’aimait pas la pointe de tristesse qui transparaissait dans sa voix. « D’accord, répondit-elle. Je reste jusqu’à ce que tu t’endormes.

– C’est mieux que rien, » bredouilla-t-il.

Leilia s’installa à côté de lui et posa la tête sur son épaule. Tout semblait si naturel. Ça n’était pas la première fois qu’ils se trouvaient dans ce genre de situation. Mais cette fois, cela lui semblait plus intime. Il passa son bras autour d’elle et la serra plus fort contre lui. « Je t’aime, » dit-il d’une voix à peine perceptible. Il pressa ses lèvres contre les siennes pendant un court instant. « Je t’ai toujours aimée. »

Le cœur de Leilia s’arrêta une seconde. Il parlait évidemment de leur amitié, non ? Sinon, c’est que le destin les avait réunis ce soir. Elle et l’homme qu’elle aimait. Il n’était pas trop tôt.




CHAPITRE 5


Un rayon de soleil traversa la fenêtre pour se poser sur le visage de Nas. Ses paupières semblaient en feu. Il se sentait incapable du moindre mouvement, seuls les battements inlassables de sa migraine occupaient son esprit. Il commençait à regretter le whisky. En essayant de bouger, il sentit quelque chose ou quelqu’un blotti contre lui. Nash redoutait d’ouvrir les yeux pour découvrir une autre erreur qu’il regretterait plus tard.

« Je sais que tu es réveillé, » dit Leilia. Sa voix était encore engourdie. « Ta respiration a changé. »

Qu’est-ce que Leilia faisait dans son lit. Que s’était-il passé la nuit dernière ? Sa mémoire était embuée. Il se rappelait seulement de regarder un Gauvain arrogant à la télé et de boire du whisky à même la bouteille. « Je n’ai pas envie d’ouvrir les yeux. » Sa voix était rauque et sa gorge sèche.

« C’est le revers de tes excès, » fit Leilia avec un léger gloussement.

Seul le rire de Leilia avait le pouvoir de soulager ses muscles endoloris. « Sages paroles que j’aurais aimé connaître avant d’ouvrir la bouteille de whisky. Maintenant, je dois payer le prix de ma stupidité. » Nash soupira. « J’ai besoin d’un café. » Mais il n’avait aucune envie de bouger. D’abord à cause de ses courbatures, mais aussi parce qu’elle était blottie contre lui. Un étrange mélange de paradis et d’enfer.

Peu importe ce qui l’avait conduite à se retrouver dans son lit, il se donna pour mission de reproduire l’heureuse surprise. D’ordinaire, la chance ne souriait pas vraiment à sa relation avec Leilia. Enfin, ce n’était pas tout à fait vrai. Elle faisait partie de sa vie, en tant qu’amie. Mais il en voulait plus.

« Moi aussi j’en veux bien, dit-elle. Je vais nous chercher deux tasses. Repose-toi encore un peu. » Leilia allait se dégager de son étreinte lorsqu’il la serra contre lui. Il voulait savourer ce moment aussi longtemps que possible.

« Attends, dit-il. On est bien là. » Leilia ne parlait pas, elle voulait seulement rester entre ses bras. Comme si c’était la chose la plus naturelle au monde. Il ouvrit les yeux et les plongea dans les siens. Ses yeux bleus la dévoraient. « Il s’est passé quelque chose hier soir ? » Ils étaient tous les deux habillés. Même s’il n’avait plus sa chemise, Leilia portait encore sa jupe et son haut. Ils n’avaient pas pu aller plus loin qu’un baiser ou un câlin. Au fond de lui, Nash espérait qu’ils n’avaient rien fait de tout ça. Il voulait savourer leur premier baiser et s’en souvenir pour toujours.

« Comme quoi ? dit-elle, perplexe.

– Je n’ai rien fait de stupide ? » Il retint son souffle en attendant sa réponse. Il priait pour ne rien avoir fait, mais ses souvenirs étaient si flous qu’il se préparait au pire.

« A part boire jusqu’à plus soif, tu veux dire ? » Elle fit non de la tête. « Non, rien de grave. Enfin… » Elle se mordilla la lèvre inférieure, laissant ses paroles en suspens.

« Crache le morceau, Strange. » Il passa la main dans ses boucles soyeuses. Il était reconnaissant de cette simple caresse.

Elle pencha la tête et demanda « Tu m’aimes ? »

La question lui coupa le souffle. Il ne s’y attendait pas. « Bien sûr, se reprit-il. Tu es ma meilleure amie. »

« Ce n’est pas ce que je veux dire. » Un léger tremblement se faisait sentir dans sa voix. « Es-tu amoureux de moi ? »

C’était la question qu’il avait tant redoutée. Nash ne comprenait pas pourquoi elle l’effrayait autant. Hier, il était prêt à tout lui avouer hier. Mais aujourd’hui, à la lumière du jour, cela lui semblait impossible. Et si elle le rejetait et ne voulait plus rester amis ? Le jeu en valait-il la chandelle ? Il risquait de perdre la seule personne qui comptait dans sa vie. Nash prit une grande respiration et hocha la tête. « J’ai toujours été amoureux de toi, Lei, dit-il d’une voix blanche. Tu as toujours été la seule pour moi. »




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